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Trois leçons de rugby

Document à la une de mars et avril 2023

Les stades de France vont accueillir les matchs de la coupe du monde de rugby du 8 septembre au 28 octobre 2023. Cet évènement sportif majeur n’a lieu que tous les quatre ans. Une aubaine pour les Archives départementales qui peuvent mettre à l’honneur, à travers ce document à la une, ce sport bien connu des Loirétains !

Dessin extrait de la revue Les sports athlétiques , n° 299, 21 décembre 1895, par Lucien Faure-Dujarric
Dessin extrait de la revue Les sports athlétiques , n° 299, 21 décembre 1895, par Lucien Faure-Dujarric

(Arch. dép. du Loiret, BH O 8372)

Au lycée d’Orléans (1ère partie) : le rugby, jeu de plein air et sport athlétique

Importé d’Angleterre, le rugby apparaît vers 1885 dans les lycées et collèges du département, où des équipes se forment pour disputer des matchs amicaux. Au lycée d’Orléans (devenu lycée Pothier en 1924), un certain Charles Péguy, élève en philosophie encore méconnu, est un adepte enthousiaste de ce sport ! Engagé dans la vie de son école, il y est président de la société de jeux de plein air. Le 10 mai 1891, un concours sportif est organisé sur le Mail (à l’emplacement actuel du boulevard Rocheplatte). Ces sports athlétiques, dont le rugby, voient alors s’affronter les lycées d’Orléans, Chartres et Bourges, ainsi que le collège de Dreux. Afin de récompenser les vainqueurs, Charles Péguy n’hésite pas à écrire au président du comité d’administration de son école, un certain Monsieur Anatole Dubec, pour réclamer des médailles ou des récompenses. Après un vote, Il obtiendra 75 francs. Nul ne sait comment sera finalement répartie cette somme entre les vainqueurs.

Lettre de Charles Péguy, président de la Société de jeux du lycée d’Orléans, demandant une récompense aux vainqueurs des concours de plein air, 16 mars 1891.
Lettre de Charles Péguy, président de la Société de jeux du lycée d’Orléans, demandant une récompense aux vainqueurs des concours de plein air, 16 mars 1891.

(Arch. dép. du Loiret, Fonds de l'Association amicale des Anciens Elèves du Lycée d'Orléans, 498 J 2)

Lettre de Charles Péguy, président de la Société de jeux du lycée d’Orléans, demandant une récompense aux vainqueurs des concours de plein air, 16 mars 1891.
Lettre de Charles Péguy, président de la Société de jeux du lycée d’Orléans, demandant une récompense aux vainqueurs des concours de plein air, 16 mars 1891.

(Arch. dép. du Loiret, Fonds de l'Association amicale des Anciens Elèves du Lycée d'Orléans, 498 J 2)

Au lycée d’Orléans (2ème partie) : Pierre Mac Orlan, le rugby avec des mots

De 1894 à 1898, un autre élève du lycée d’Orléans se passionne pour ce sport : Pierre Dumarchey, plus connu sous le nom de Pierre Mac Orlan ! Il raconte dans son ouvrage Le rugby et ses paysages sentimentaux comment le rugby est arrivé sur les terres orléanaises : « Tandis que les évènements se déroulaient ainsi dans le royaume des Grands, chez les Moyens, le bruit, la rumeur venue de l’ouest apportait dans le vent du côté du Havre la nouvelle qu’un messie en cuir fauve était né dans la lumière de la liberté. On l’appelait l’Ovale ». Jean-Pierre Bayard narre également la vie de l’écrivain dans un article paru le 4 septembre 1951 dans La République du Centre. On y apprend que porter la tunique noire et jaune du lycée (« comme un corselet de guêpe ») est la manière de se montrer « la plus digne » pour des élèves qui cherchent constamment « à s’enlaidir et à paraître le plus âgés ». Le ballon de rugby tombe « comme un bolide » sur toute une génération d’adolescents et « comme une divinité sentimentale, dominait leur vie scolaire ». Des mots qui combinent merveilleusement bien ce sport et la littérature, et qui démontrent à quel point le ballon ovale a été important dans la vie de Pierre Mac Orlan, ballon qu’il a longtemps tenu dans ses mains sur les terrains d’Orléans, de Rouen puis de Paris.

Article de journal consacré à Pierre Mac Orlan et à sa passion pour le rugby, [année 1950).

(Arch. dép. du Loiret, 46 J 71)

Instituteur, rugbyman et « père d’un stade » : Maurice Béraud

Maurice-Emile Béraud naît le 1er septembre 1889 à Montargis. Avant de devenir instituteur, il fréquente tout naturellement l’école normale d’Orléans de 1906 à 1909. Ses prédispositions sportives sont déjà visibles sur son dossier d’admission : il y est décrit comme ayant une constitution physique « très robuste » et développant « ses muscles par la gymnastique ». C’est donc avec cette école que débute son aventure rugbystique ! En effet, celle-ci compte une section de rugby dont il devient un membre actif !

Maurice Béraud (homme au centre du 2ème rang, avec une moustache) et l’équipe de rugby de Montargis, sur le terrain du Pâtis, octobre 1912
Maurice Béraud (homme au centre du 2ème rang, avec une moustache) et l’équipe de rugby de Montargis, sur le terrain du Pâtis, octobre 1912

(Arch. dép. du Loiret, 510 J 8)

Durant ses trente-cinq années de carrière, de 1909 à 1944, il est affecté dans de nombreuses communes du Loiret : Montargis bien sûr (1909), mais aussi Gien (1912-1913), Châlette (1913-1921), Saint-Martin d’Abbat (1921-1926), Ligny-le-Ribault (1926-1927), la Ferté-Saint-Aubin (1927-1934) et enfin Orléans à l’école des Aydes de la rue Bannier (1934-1944). Durant tout ce temps, son investissement sans borne pour l’enseignement n’a d’égal que celui dont il fait preuve pour le sport. En effet, gymnaste toujours accompli, il est en parallèle de sa carrière d’enseignant membre de l'équipe sportive du patronage laïque de Montargis (le Cercle Pasteur). Il entre en 1919 à l'Union sportive montargoise dont il devient l'un des dirigeants les plus actifs. Capitaine de l'équipe de rugby, le sport collectif le plus ancien pratiqué à Montargis, il atteint la demi-finale du championnat de France sur la saison 1921-1922.

Il est rapidement conscient que pour emmener encore plus haut son équipe, des infrastructures de qualité sont nécessaires. Maurice Béraud rédige dès le 27 août 1919 un rapport méthodique destiné à la municipalité de Montargis pour la création d’un stade. Sa demande argumentée ; un nouveau stade peut notamment aider à rendre forts et résistants les garçons et les filles et donc sauver des vies humaines ; trouve écho auprès des élus qui décident de la construction d’un nouvel équipement sportif à l’orée de la forêt. Le projet dessiné par l’instituteur comprend notamment des tribunes, un terrain (pour le football et le rugby) et même deux salles d’escrime ! En 1947, le « père du stade » de Montargis donne son nom à cet ensemble sportif, par approbation du conseil municipal. Les sportifs montargois se rendent désormais au stade municipal Maurice Béraud ! L’entrée du complexe est visible dans la brochure Le rugby à Montargis présentée ci-dessous. Maurice Béraud y rédige même une anthologie du rugby montargois.

Une équipe de Rugby prévoit sur quinze joueurs : Huit joueurs forts et actifs, deux légers et rusés, quatre grands et rapides, un dernier, modèle de flegme et de sang-froid. C’est la proportion idéale entre les hommes.

Jean Giraudoux, 1928

Maurice Béraud fut un homme habité, en tant qu’instituteur, sportif et dirigeant, par la réelle conviction que le sport avait une valeur éducative forte, et tout particulièrement le rugby ! Ce qui ne se dément pas de nos jours.

Son fonds riche, notamment en photographies, peut vous donner un rapide aperçu de la vie du « père du stade » de Montargis.

Equipe de rugby du stade Français sur le terrain de l’allée des platanes à Châlette, 1910. 1 4
Equipe de rugby du stade Français sur le terrain de l’allée des platanes à Châlette, 1910.

(Arch. dép. du Loiret, 510 J 8)

Equipe de rugby du stade Français sur le terrain de l’allée des platanes à Châlette, 1910. 2 4
Equipe de rugby du stade Français sur le terrain de l’allée des platanes à Châlette, 1910.

(Arch. dép. du Loiret, 510 J 8)

Reconstitution de l’équipe de rugby de l’Union Sportive Montargoise, saison 1919/1920. 3 4
Reconstitution de l’équipe de rugby de l’Union Sportive Montargoise, saison 1919/1920.

(Arch. dép. du Loiret, 510 J 8)

Projet de stade dessiné par Maurice Béraud, juillet 1919. 4 4
Projet de stade dessiné par Maurice Béraud, juillet 1919.

(arch. dep. du Loiret, 510 J 7)

Le saviez-vous ?

Le Rugby-Club orléanais accéda à l’élite de ce sport en 1981. Jean-François Dartigues, joueur de cette équipe, témoigne de cette épopée dans l’article ci-dessous :

Extrait du numéro spécial de La République du Centre « 50 ans de sports dans le Loiret », décembre 1996.  Le RCO accède à l’élite nationale
Extrait du numéro spécial de La République du Centre « 50 ans de sports dans le Loiret », décembre 1996. Le RCO accède à l’élite nationale

(Arch. dép. du Loiret, BH BR GF 14870)

Pour aller plus loin

Tous les deux mois, les Archives départementales du Loiret mettent en valeur un ou des documents extraits des fonds. Découvrez tous les documents à la une.

Venez découvrir nos fonds

Découvrez le riche fonds Maurice Béraud 510 J en cliquant ici, et lisez l’article paru sur notre site à l’occasion de la mise en ligne de son inventaire.

Le lycée d’Orléans (devenu lycée Pothier en 1924) et l’association amicale des Anciens Elèves du Lycée d'Orléans ont également une place de choix dans nos archives. 

Bibliographie

  • Exposition du service éducatif La naissance du sport dans le Loiret, 1975.

(Archives départementales du Loiret, référence 1794 W 411)

  • BARITAUD (Bernard), Pierre Mac Orlan, sa vie, son temps, édition Droz, 1992.

(Bibliothèque des Archives départementales du Loiret, référence BH O 5187)

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